Nous nous voilerons partout, en échange de notre silence.
Texte de type cut-up avec des apparitions impromptues de Churchill, de Michel Bounan et d'autres dont j'ai oublié les références.
Les voilà avec leurs drapeaux, leurs flammes fières, leurs idéologies minables, leurs illusions, leurs jugements, leurs discours flétris, leur justice, leur liberté, leur paix, leur espoir, leurs lois, leur terrorisme. Ils clament haut et fort qu'ils sont le nouveau monde, la nouvelle vérité, la véritable parole, la seule possibilité, le chemin de victoire, la leçon à vous donner. Délivrez-nous de vos drapeaux, de vos flammes fières, de vos idéologies minables, de vos illusions, de vos jugements, de vos discours flétris, de votre justice, de votre liberté, de votre paix, de votre espoir, de vos lois, de votre terrorisme. Superstitions avec lesquelles vous nous endormez. Autrefois valeurs aux contours clairs Aujourd'hui valeurs gardées dans le trouble afin de perdre la plupart d'entre-nous qui prennent peur à la moindre action. Jamais nous ne nous battrons, nous nous voilerons dans les rues, sur les plages, sur la mer, dans les collines, dans les villes, dans les champs. Nous irons jusqu'à la disparition. Nous voilerons notre envie de nous battre parce que vivre n'est pas notre combat. Nous nous laisserons rien d'autre que de la sueur, de la peur, des larmes. Autant de maladies que la société se chargera de guérir en apportant amour, gloire et beauté à ceux et celles qui n'auront que pour armes : la sueur, la peur et les larmes. Quel est donc ce contrat social Qui nous flanque une identité de pacotille qui n'est jamais la nôtre Mais celle des idéologues, des politiques, des données statistiques, des journalistes, des experts, des designers, des mannequins, des pages psy des magazines, Qui, mieux que nous, savent qui nous sommes, ce que nous sommes, et pourquoi nous sommes ? Quelle est donc cette identité qui nous est donnée sans notre consentement, notre avis, notre personne, ce que nous sommes ? Ils prétendent nous connaître si bien qu'ils sont prêts à nous offrir des lois, des jugements, des leçons, afin de nous montrer que la raison est avec eux, avec elles. La raison de connaître notre vie sur la base de rumeurs (pour les infâmes), de statistiques (pour les journalistes), de courriers psy (pour les stupides) d'analyses creuses (pour les donneurs de leçons). Et qu'avons-nous en échange ? Le désir de ne pas être le corps que nous devrions être. Le corps d'un mannequin à porter comme une seconde peau vue partout dans les publicités, les films, les pages des magazines, des mangazines, qui ne sera jamais la nôtre mais celle d'un rêve imposé par un système qui explose les corps par de multiples moyens : alcools pollués, drogues manipulées, nourritures dévitaminées, médicaments frelatés, contamination généralisée par les véhicules et les industries. Pour cacher tout cela la nudité de l'humain est mise en avant comme l'ultime moyen de recouvrir les désastres du système, comme l'ultime trophée qui fabrique une peau douce et agréable, bronzée et tannée par les rayons d'un soleil dont nous ne captons plus l'énergie qui est tout de suite rejetée et transformée en cancer de la peau qu'il faut enduire d'un masque protecteur. La peau est le dernier rempart aveugle qui sépare le monde extérieur qui ne peut plus digérer du monde intérieur qui est obligé d'ingérer tout cela à l'aide de quelques médicaments miracles et des pièces mécaniques du corps à remplacer en cas de défaillance, d'impossibilité à supporter ce travail supplémentaire qui épuise le corps en moins de temps qu'une vie entière écoulée en quelques décennies. Notre corps est ainsi le meilleur terrain morbide, d'expérimentation, d'apprentissage, du rêve des pièces défectueuses à changer comme on change une ampoule grillée. Un corps détaché de son tout qui se doit de transformer, de supporter, d'extirper les quelques miasmes d'énergie qui subsistent encore et qui n'ont pas été effacés ou contaminés par de multiples agents qui n'ont plus leur place puisqu'ils prennent toute la place par leur quantité trop nombreuse. Voici le rêve absolu, celui de pouvoir retarder la décomposition généralisée. Les yeux se tournent vers ce qui compose les corps, l'ADN, pour comprendre les mécanismes qui induisent une réplication de plus en plus altérée afin de la corriger et d'empêcher la venue de la mort vue comme une maladie que l'on peut guérir. Quelle est donc cette identité qui nous est donnée sans notre consentement, notre avis, notre personne, ce que nous sommes ? Je bois à la source le nectar, Et te dis : «Tchin Tchin».
2008